Débits fournis par les soufflets d'alimentation
Ce débit est évidement variable selon les fabrications. Prenons pour exemple de calcul ma fabrication BB 29.
1 Estimation par les dimensions des soufflets.
Les volets battants font 41 cm par 13 cm. La course générée par le vilebrequin est de 53 mm.
Le volume d'air fourni par un volet mobile correspond au volume aspiré x 2 (montée – descente).
Le volume aspiré correspond au volume balayé par le volet moins le volume occupé par les éclisses.
Volume balayé par un volet :
( 4,1 x 1,3 x 0,53 x ½ ) x 2 = 2,82 litres par tour de manivelle.
Volume occupé par les éclisses1 :
[( 1/3 x 0,53 x 0,53 x 4,1 ) / 4] x 2 (de chaque côté) x 2 (dessus et dessous le volet) + [( 0,53 x 0,53 x 1,3 ) / 4] x 2 (dessus et dessous le volet) = 0,566 litres.
Volume d'air aspiré : 2,82 – 0,566 = 2,26 litres pour un volet, x 2 = 4,53 litres pour deux volets.
La vitesse du carton est de 6 cm par seconde ; le diamètre du rouleau d’entraînement étant de 2 cm, le rouleau fait : 6 cm/s / 6,28 cm = 0,9554 tour par seconde.
Le rapport de vitesse vilebrequin / rouleau d’entraînement est de 16/24 dents, soit de 2/3.
Le débit d'air aspiré est donc de : 4,53 x (3 / 2) x 0,9554 = 6,49 litres par seconde.
Le rendement de la pompe influe sur le débit fourni. On peut estimer que les volumes morts et les temps de fermeture des clapets amènent un rendement de 0,7.
Le débit théorique serait donc de : 6,49 x 0,7 = 4,54 litres par seconde.
Il faut en déduire les pertes (la réserve se dégonfle lentement quand on cesse de tourner).
La rotation lente de la manivelle permet de maintenir le volet de la réserve en position haute, sans que la soupape de décharge ne s'ouvre. Il faut pour cela 1 tour de manivelle en 7 secondes, soit un volume de 4,53 litres (volume aspiré par les deux volets) en 7 secondes = 0,647 l/s pour compenser les pertes.
Le débit théorique de la soufflerie devient donc : 4,54 – 0,65 = 3,89 litres par seconde.
Ce volume est défini à la pression atmosphérique (côté aspiration), soit 1016 cm CE,
et correspond à environ 14 m3/h,
ou un peu moins ( x 1016/1029 ) à la pression de service de 13 cm CE.
2 Estimation par le temps de gonflage de la réserve
On remarque que la réserve est mise à la pression de fonctionnement en ½ tour de manivelle.
La réserve gonflée correspond à la mise en pression du volume total de la réserve (soufflet + socle + boite des soupapes + talon soufflet + gosier = 5,24 litres) plus l'augmentation de volume par montée du soufflet.
Volume entré pour l'augmentation de la pression (on passe de 1016 hPa à 1029 hPa):
(5,24 litres x 1029/1016) – 5,24 = 0,067 litres
Volume de gonflage du soufflet : 1,20 litres
Total : 1,27 litres, pour ½ tour de manivelle
Cela représente pour 1 tour 2,54 litres multiplié par 3/2 pour fonctionnement à la vitesse normale, soit : 3,81 litres par seconde.
3 Incertitudes
La première méthode d'estimation présente l'avantage de mesures dimensionnelles précises, mais des incertitudes dans le fonctionnement (volumes morts, fuites, rendement,...)
La seconde méthode inclus toutes les pertes, mais présente beaucoup d'incertitude dans la valeur exacte du ½ tour pour gonfler la réserve.
Néanmoins, les valeurs trouvées sont homogènes : 3,89 et 3,81 litres par seconde.
4 Estimation par le nombre de flûtes susceptibles d'être alimentées simultanément.
Nous disposons du calcul de débit individuel des flûtes (chapitre précédent) pour lequel nous retenons un coefficient de forme de 0,98. Nous allons vérifier combien de flûtes la soufflerie peut alimenter simultanément.
Le cumul des consommations des flûtes nous donnera le débit fourni par les soufflets.
L'essai consiste à scotcher la flûte de Pan, puis à découvrir les trous progressivement jusqu'à ce que la soupape de la réserve se ferme, et donc que le débit entrant par la pompe égale le débit sortant par les flûtes.
Cet essai mené sur les flûtes graves permet d'alimenter les flûtes N° 1 à 5, soit une surface de fente cumulée de 98 mm2.
Sur les flûtes aiguës, on peut alimenter les flûtes N° 15 à 28 , soit une surface de fente cumulée de 96,55 mm2.
Les débits calculés correspondants sont de 4,48 et 4,40 litres par seconde soit passablement plus que les estimations du chapitre 2 ! Mais ces valeurs ont été calculées avec la pression de la réserve, 13 cm CE.
Un calcul des débits en tenant compte de pertes de charges s'impose.
Nous avons donc mesuré la pression réelle en pied de flûte, en fonctionnement, à l'aide d'un té placé juste sous la flûte, et repris les calculs.
Cette fois, les débits cumulés des flûtes fonctionnant simultanément sont respectivement de 3,92 et de 3,74 litres par seconde.
Ces valeurs sont donc très homogènes avec les estimations du chapitre 2.
Les résultats de ces mesures sont rassemblées dans le tableau Excel ci après
NB : Il faut remarquer que les épaisseurs de fente notées ici sont des valeurs cibles pour la réalisation des flûtes.
Malgré tout le soin apporté, la réalité peut être légèrement différente. Cela s'observe de manière indirecte, quand on représente graphiquement les pertes de charges mesurées sur chaque flûte : la progression présente des irrégularités qui ne sont probablement pas uniquement dues aux conduits, lesquels, par groupe de flûtes sont assez semblables dans ma réalisation.
Plus probablement, la réalisation des fentes (ajustées de plus « à l'oreille » pour obtenir, autour de l'épaisseur cible, une puissance estimée correcte) a introduit des variations. La vérification faite à l'aide de cales d'épaisseur n'est pas idéalement précise. Il s'ensuit que le tableau ci dessus n'a pas une précision idéale non plus.
5 -Conclusion
Néanmoins, le présent travail permettra aux facteurs amateurs (et aux autres ?) d'avoir peut-être une meilleure idée des débits d'air en jeu dans nos instruments, et de savoir calculer ces débits à partir des bonnes formules.
Les estimations empiriques pourront être confirmées ou infirmées, les soupapes et les diamètres de canalisations dimensionnées à propos.
Les débits des pompes pourront être calculés avec prudence, en pensant aux coefficients de rendement, qui sont en général oubliés : j'en veux pour preuve les dimensions des systèmes d'alimentation souvent observés, dont le résultat n'est pas toujours à la hauteur...
Le test du nombre de flûtes alimentées simultanément est facile à faire, et permet d'estimer correctement son orgue.
A vos calculettes ….
1 On remarquera que quatre paires d'éclisses ouvertes à 90 ° et juxtaposées dos à dos forment une pyramide, de hauteur égale à la longueur des éclisses et de base carrée égale à la hauteur des éclisses multipliée par √2. Ce dernier chiffre est identique au débattement du volet, si on a pris cette option ( éclisses à 90 ° à l'élongation maxi) à la construction. Le volume d'une pyramide est 1/3 x surface de la base x hauteur.
Il faut ajouter le volume occupé par les éclisses d’extrémité, qui forment un parallélépipède de même coté, pareillement quatre à quatre.
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